La complexité est-elle une fatalité pour un assureur de personnes ?

Auteur : Pascal COMPET, Associé

La complexité ne peut pas être une fatalité. La question est posée et formulée de façon provocatrice en observant les assureurs de personnes sur un temps long. Les constats sont univoques : il faut plus de moyens humains et financiers pour distribuer et gérer des contrats d’assurance santé, prévoyance et d’épargne aujourd’hui qu’il y a 15, 20 ou 30 ans (cf. ratios de chargements rapportés aux primes, nombre d’employés dans le secteur qui augmente ainsi que les coûts tant salariaux et informatiques qui augmentent également en valeur et en volume). Certains expliquent ces augmentations de coûts par un niveau de protection et de service en assurance de personnes qui lui aussi augmente avec le temps. D’autres l’expliquent par le niveau d’exigences réglementaires qui s’est accru et qui mobilise des moyens coûteux pour être conforme. Ces arguments pertinents tendent à considérer que l’assureur a peu de prise sur sa façon de fonctionner, triplement contraint par les exigences du client, celles du régulateur et celles d’un environnement technologique évoluant en permanence. 

Cet ensemble de contraintes imposées par la réglementation ou subies par les exigences des clients conduirait à complexifier toujours plus les modes de fonctionnement de l’assureur de personnes, cette complexité se révélant dans la croissance des coûts.

Le consultant comme le dirigeant ne peut se satisfaire d’une situation sur laquelle il aurait peu de prise.

Quelles sont alors les marges de manœuvre ?

La technologie depuis longtemps contribue à la simplification par les automatisations qu’elle permet et est porteuse de promesses avec plus de digitalisation, plus d’exploitation des données, plus d’intelligence artificielle. La mise en place de ces nouvelles technologies et applications afférentes apportent indéniablement plus de services aux clients et plus d’automatisation et de flexibilité sur la façon de travailler pour un assureur. Dans le même temps cela contribue très fortement à complexifier le système d’information de l’assureur par la multiplicité des applications et des interfaces entre elles qu’il faut maitriser tant d’un point de vue fonctionnel métier qu’informatique. De surcroît, le potentiel d’usage de ces nouvelles fonctionnalités permises par la technologie pousse à la sophistication métier et par suite à la complexité. 

La technologie peut donc être une solution mais pas l’inducteur de cette simplification parce qu’elle n’en traite pas la cause racine mais les multiples symptômes.

Dès lors, quels sont les inducteurs de la simplification de l’assureur de personnes ?

Revenant aux fondamentaux du métier, tout procède du produit d’assurance. La complexité vient très souvent de produits très sophistiqués par les options, les garanties, les règles de souscription, de gestion des cas particuliers foisonnants, … tant pour les conseillers, que pour les gestionnaires ou les clients.  Cette complexité est accrue lorsque les portefeuilles d’offres s’étoffent avec le temps. Les offres sophistiquées ont été une réponse du marché aux besoins des assurés dont il était considéré qu’ils attendaient des offres personnalisées répondant à la spécificité de leurs besoins. De manière paradoxale, cette sophistication semble produire un effet contraire aux attentes : les enquêtes de perception des assurés mettent souvent en évidence un manque de lisibilité des contrats et des lourdeurs dans leurs interactions avec leur assureur.

De notre point de vue, il ne peut pas y avoir de simplification pour l’assureur et l’assuré s’il n’y a pas de simplification de l’offre, c’est à dire de la gamme et de chaque produit la composant. La diminution du nombre d’offres – qui n’implique pas la diminution du niveau de protection proposé aux clients et la simplification de celles restant –  se propage à l’ensemble des domaines de l’entreprise : vente, souscription, gestion des contrats, gestion des prestations, gestion de la relation clients, …

Toutefois, seule la simplification de l’offre ne suffit pas à simplifier les modes de fonctionnement de l’assureur de personnes.

La simplification de la gouvernance opérationnelle est l’autre condition. Celle qui consiste à clarifier les rôles et responsabilités de chacun, à créer les conditions pour que les coopérations à l’intérieur de l’entreprise jouent pleinement pour, au final conduire à une responsabilisation individuelle et collective. La « souplesse encadrée » permet à chacun des collaborateurs d’être plus qu’un acteur mais un moteur de la simplification parce qu’il se sent légitime pour le faire et qu’il a intérêt à le faire.  Au fond, simplifier la gouvernance opérationnelle consiste d’abord à clarifier et simplifier l’organisation. La simplification de l’organisation n’est jamais achevée, il n’y a pas d’état stable durable du fait tant de l’évolution de l’environnement que des modes de fonctionnement internes. Simplifier la gouvernance opérationnelle procède aussi d’une culture et d’une approche managériale qui érige la simplicité comme méthode et qui le démontre au quotidien dans les décisions prises et leurs applications.

Ces deux conditions posées –  simplification de l’offre, simplification de la gouvernance opérationnelle – l’ensemble des autres composantes des modes de fonctionnement peuvent être simplifiés, dans le cadre d’une amélioration continue ou bien dans le cadre de projets ad hoc. En particulier les leviers d’allégements des contrôles ou bien ceux d’une amélioration de la qualité qui diminuent les réitérations et permettent d’anticiper les cas clients ou de gestion plus complexes, peuvent être actionnés.

Corolaire : un projet de simplification a peu de probabilité d’atteindre son objectif s’il n’est pas précédé d’une simplification des gammes, d’une simplification des offres, d’une simplification des services ainsi que d’une simplification de la gouvernance opérationnelle – organisation et culture

Abelya Partners, le cabinet de conseil spécialisé auprès des acteurs de l’assurance et de la protection sociale, s’engage pour des transformations responsables. En l’espèce, la responsabilité consiste à ne pas considérer qu’une méthode ou qu’un outil permet d’atteindre la simplification. C’est en interrogeant les fondamentaux du métier de l’assureur et la façon qu’il a d’exercer son métier que nous parvenons à simplifier les parcours, les processus, les modes de fonctionnement.  

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